chrysta
Messages : 173 Date d'inscription : 15/01/2017
| Sujet: Le tabac Tresniek - Robert Seethaler Dim 9 Avr - 10:02 | |
| [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Dans la Vienne de la fin des années 30, sur fond de montée du nazisme et de l’antisémitisme, Franz, a quitté son village et le contexte de misère dans lequel il vivait sur injonction de sa mère, pour venir travailler à Vienne dans le tabac d’Otto Tresniek, une vieille connaissance de sa mère. Apprenti auprès de cet homme qui deviendra comme un mentor, il rencontre par l’entremise du tabac un vieux professeur, S.Freud, avec lequel il entretiendra une relation amicale, qui prend naissance et se poursuit en partie autour de l’entrée dans la vie amoureuse de Franz suite à sa rencontre avec Anezka. J’ai été séduite en entrant dans ce roman sur l'art de l’auteur de faire ressentir les ambiances. Notamment celle du tabac, pour ne citer qu’elle, qui nous amène à « voir » les lieux dans notre imaginaire, s’en imprégner, même presque à en ressentir les odeurs. Et ceci perdure tout au long du livre. C’est une atmosphère qui est posée et qui nous ramène à cette époque, chaque lieu (ou presque), m’ayant un peu donné le sentiment d’y être, de le voir, de le ressentir. Aux côtés de Franz, à travers son regard un peu naïf des débuts qui va évoluer vers une vision bien moins candide, au fil de ses interrogations et constats, nous découvrons la société de l’époque prise dans le « débousselement » de ses valeurs, et nous assistons à la montée en puissance d’Hitler et du nazisme, à l’installation progressive de l’antisémitisme. Des quelques éléments anodins distillés au début du livre comme éléments de paysage, l’auteur agrémente de plus en plus le décor de son histoire d’événements et éléments signes de la montée du nazisme, ce jusqu’aux événements dramatiques de la fin ou plus rien n’est réellement « discret ». Et nous ouvrons avec Franz progressivement sur ce qu’il se passe, sur comment cela monte en puissance pour prendre, vers la fin du roman, beaucoup de place, voire toute la place. Ce seront d’abord quelques croix gammées aperçus au bras de passants, puis des cris lors de manifestations, etc… ce jusqu’aux arrestation musclées et à leurs conséquences mortelles. Cela montre aussi comment on se réveille souvent trop tard dans ces contextes qui font leur lit doucement. Je ne dirai pas que ce livre a été très addictif pour moi, mais il s’est insinué tout en douceur, avec ce vague sentiment de bizarrerie d’abord, puis, avec Franz, ce sentiment que le monde devient fou, pour terminer avec de l’indignation, voire du dégoût, tout en même temps que de l’impuissance. Franz, lui, garde une certaine liberté de pensée qui le perdra, comme d’autres avant lui. C’était une jolie découverte en tous les cas, et je remercie Tom Léo de cette idée de lecture qui m’allait sur les thèmes « comme un gant ». Une lecture qui ne sera certes pas parmi mes préférées, mais dont la traversée a été riche et très intéressante. Je me lancerai d’ailleurs peut être dans l’autre roman traduit en français de cet auteur. | |
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