chrysta
Messages : 173 Date d'inscription : 15/01/2017
| Sujet: Les dames du lac - Marion Zimmer Bradley Ven 16 Juin - 15:23 | |
| [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Résumé:La légende du roi Arthur et des chevaliers de la Table ronde n'avait, depuis longtemps, inspiré un roman d'une telle envergure, d'un pareil souffle. Merlin l'Enchanteur, Arthur et son invincible épée, Lancelot du Lac et ses vaillants compagnons, tous sont présents mais ce sont ici les femmes qui tiennent les premiers rôles: Viviane, la Dame du Lac, Ygerne, duchesse de Cornouailles et mère d'Arthur, son épouse Guenièvre, Morgane la fée, sur et amante du grand roi... Cette épopée envoûtante relate la lutte sans merci de deux mondes inconciliables, celui des druides et des anciennes croyances défendant désespérément un paradis perdu et celui de la nouvelle religion chrétienne supplantant peu à peu rites et mystères enracinés au cur de la Grande-Bretagne avant qu'elle ne devienne l'Angleterre. Commentaire : Après ma récente aventure entre les lignes de « L’enchanteur » de Barjavel, je repars dans la découverte et redécouverte de la légende arthurienne, ou plutôt d’une de ses réécritures. Mythe intemporel basé sur des écrits moyenâgeux, d’abord sous la plume de moines puis d’écrivains qui l’ont enrichi, il avive mon intérêt tant personnel sur les peuples celtes, leurs croyances et le basculement entre celles-ci et leur écrasement par la chrétienté, que professionnels sur la fonction du mythe et ce qu’il véhicule. Dans ce premier tome, introduit par une fée Morgane à un âge avancé de la vie et porté tout du long par des voix de femmes (Ygerne, Viviane, Morgane, Guenièvre), nous entrons pas à pas dans les méandres de la légende arthurienne. Appuyé sur une vision féminine, ce récit semble par là même restituer une place aux femmes à une période où la vénération de la Déesse, et par elle-même du féminin, appartenant aux rites ancestraux celtiques vient peu à peut-être attaqué par la chrétienté et son idéologie. Celle-ci en effet prône l’adoration d’un Dieu unique plutôt que de multiples, et transforme la place et la vision de la femme dans la société qui devient porteuse de la responsabilité de l’infamie du péché. Au travers des pages, nous assistons en effet à la confrontation des rites ancestraux celtes et des valeurs religieuses chrétiennes, avec l’émergence de la prépondérance de cette dernière et la tentative d’éradication des anciennes croyances relayées à la place de rites païens et du démon. Dans cet affrontement, Arthur se situe un temps dans la délicate place de maintenir les deux croyances vivantes avant de se laisser convaincre par les arguments de Guenièvre et d’abandonner la bannière du dragon, symbole des anciennes croyances. On retrouve là une sorte de mythe d’Adam et Eve et du serpent, et une femme encore rendue à l’origine d’un choix capital non sans conséquences sur l’avenir. Nous assistons à l’émergence d’une religion et de son intolérance, et au déclin d’autres croyances. D’une harmonie avec la nature, et d’une perception de la sexualité peu entravée telle que vécue sur Avalon et par les peuples anciens, nous assistons à l’émergence de la notion de péché qui apparaît clairement dans le déploiement du triangle amoureux constitué de Arthur, Guenièvre et Lancelot, source du sentiment par celle-ci d’être maudite et de ne pouvoir enfanter qui l’amène à solliciter d’Arthur le reniement des anciennes croyances, et lui à y accéder. Mais cette sensée « malédiction » ne commence-t-elle pas bien avant ? Arthur et Morgane, demi frères et sœurs, sont en effet objets de manipulations sous couvert de rites ancestraux et de tentative de pérenniser les croyances ancestrales de manière « politique » ; on leur fait en effet sciemment commettre l’inceste, les utilisant comme de simples pions. Et la place des femmes, si importante à Avalon, n’est-elle pas elle-même un ersatz de ce qu’elle pourra être par la suite, sous la chrétienté : adulées certes, mais empêchées de vivre vraiment, tenue à une vie de sacrifice dévouée corps et âmes à la Déesse Je passe ici les aspects de malversations, jalousies et rivalités frères / sœurs , guerres, etc… Même si, un autre point d’interrogation et d’intérêt me semble historique : à quelle période réellement et sur quel terrain apparaît ce mythe, et q’esu ce qu’il vient tenter de mettre en élaboration ainsi. Mais ceci reste un autre épisode, et il me reste avant d’avancer sur les idées que cela m’inspire à lire le second tome pour avoir une vision globale de ce mythe, si approchant en certains points de celui d’Oedipe. | |
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